Des trafiquants non inquiétés

09/01/2013

Ces intrépides et insaisissables trafiquants qui s’adonnent au commerce juteux des bois précieux ne ratent aucune occasion pour attirer les feux des projecteurs de l’actualité. A Toamasina, juste après la fête de la Nativité, deux hommes dont un affairiste karana et une personnalité proche du Palais d’Ambohitsorohitra furent épinglés dans une affaire de bois de rose. Surpris et interpellés par les autorités judiciaires dans des conditions qui conduisent tout droit en prison, le duo n’a fait l’objet d’aucune arrestation. Une source sûre, proche des instances judiciaires du grand port de l’Est, confie sous le sceau de l’anonymat, qu’après avoir été au centre d’intenses négociations entre la capitale et le parquet, les individus retrouvent la liberté. Puis, plus personne n’en parle. Motus et bouche cousue !

Par le passé, à plusieurs reprises, des affaires relevant d’infractions punissables, passibles de sanctions pénales furent enterrées purement et simplement. Pour ce qui concerne cette affaire de bois de rose en date du 27 décembre 2012, la source fait état de fortes sommes qui ont servi pour négocier la libération et changer de mains, le temps de tout mettre en ordre, pour que plus personne n’en entende parler. A l’heure où nous mettons cette information sous presse, les deux « intouchables » déambulent, cheveux au vent, dans les rues de la ville. On se demande alors dans ce cas, jusqu’à quel niveau, la décision de mettre en liberté ces truands notoires, a été prise et pourquoi. Il est clair et limpide, d’après les révélations de la source, que c’est en soudoyant un ou deux décideurs qu’ils ont échappé de la détention préventive en attendant d’être jugé. Devant des faveurs de ce genre accordé aux uns, parce qu’ils sont, selon toutes les apparences, soutenus et protégés dans les hautes sphères du pouvoir, on ne peut que se demander pourquoi le Tangalamena Patrick Zakariasy n’ait pas pu bénéficier de pareilles attentions. Serait-ce parce qu’il n’était pas perméable aux propositions de solutions médianes assorties de paiements de fortes sommes ?
A propos justement de l’autorité des juges, en ce qui concerne la privation de liberté, un avocat chevronné déclare un jour que la pratique de la corruption est devenue tellement scandaleuse que certains fonctionnaires de l’appareil judiciaire ne s’en cache plus. Il ajoute sur un ton désespéré que « les personnes qui, pour une raison ou une autre, doivent passer en jugement, préfèrent de loin s’adresser au magistrat qui lui décide, au lieu d’un avocat qui plaide...». Concernant un justiciable qui s’est payé le service d’un membre du barreau, en privé, un juge de siège avait osé avouer une fois, avec un ton lourd de menace. « Si pour espérer gagner son procès, il a trouvé les moyens de payer les honoraires d’un avocat, cela m’étonnerait qu’il s’en sorte, parce qu’il a tort de n’avoir pas pensé à moi… ». Face à un tel cynisme, on a froid sans le dos, même s’il n’a pas dit le fond de sa pensée. Mais revenons à ces affaires de bois de rose qui font couler tant d’encre depuis quelques années. On est effaré lorsqu’on réalise que malgré la détermination de quelques rares personnes de bonne volonté à lutter contre ce fléau et la corruption généralisée qu’il entraîne, les membres actifs des réseaux de ces trafics affichent une prospérité à rendre jaloux n’importe quel honnête citoyen.
Nous venons d’apprendre que les forêts protégées des alentours de Mahanoro sont maintenant décimées à cause des exploitations qu’on y pratique, sous le nez et la barbe de l’agent local des Eaux et Forêts, avec la complicité d’un maire du voisinage. Les prédateurs se préparent actuellement à continuer ces activités de destruction vers la direction nord du littoral. Si aucune mesure n’est prise à temps, il faut s’attendre à une déforestation rapide de toute la région. L’appât du gain incite certains membres des autorités locales à fermer les yeux sur la destruction à grande échelle de l’environnement. Le temps est venu pour mettre un holà sur toutes ces dérives.